fiertés révélées
Samedi 9 juin 2018.
L’angoisse est dans la foule, dans le peu d’heures de sommeil, dans l’anxiété d’une non-légitimité. Mais l’excitation me pousse dehors. Et là, déjà, les rues résonnent. Toulouse étincelle de plusieurs milliers d’âmes colorées. L’arc-en-ciel est tissu. Il scintille dans les centaines de drapeaux qui s’agitent tout autour. La musique glisse sur la peau, hérisse les poils. Elle pénètre la surface de l’épiderme, capture les cellules, vient se mêler aux globules rouges et blancs. Elle fait vibrer le corps de l’intérieur, réveille les sens, proclame la fierté d’un être qu’on a trop gardé dissimulé au fond d’un placard mal aéré.
Ouverture des idées. Les visages s’illuminent des sourires de toutes ces personnes qui dansent, chantent, crient leur joie à coups d’étendards et de claquements de doigts. C’est vivant d’une vivacité qu’on oublie trop souvent de partager.
Toulouse, belle Toulouse, qui m’offre l’opportunité de rayonner. Marche des marches auxquelles j’ai toujours rêvé de participer. Les paillettes décorent les joues. Les yeux brillent d’un éclat qu’on ne connaissait pas. Le sourire, lui, est éclatant. Et à mesure qu’il grandit, qu’il étire le visage au rythme d’un corps qui ne peut s’arrêter de bouger, les souvenirs remontent.
Septembre 2016. Les larmes encagent les expressions. Ou plutôt, elles les massacrent, rendent la gueule immonde. Ça pue la tristesse, le désespoir et la honte. On préférerait ne plus avoir rien à ressentir, jusqu’à enfermer les souvenirs dans une boîte qu’on n’ouvrirait plus jamais. On chiale et on se retient de se faire pleurer autrement. On se concentre sur les sourires. On les compte en fin de journée. Un. Un et demi. Deux. Un. Trois. Aucun. Quatre. On finit par trouver un rythme. Et le rythme, c’est cette danse qu’on choisit d’accepter, d’appréhender complètement. On se tourne vers la couleur et on quitte le noir et blanc. Petit à petit. À coups de sourires, d’éclats de rire, d’amitiés, de regards, et de cadeaux déballés.
Parce que les moments difficiles m’ont mené là. Dans ce ballet de gorges asséchées par une montée de sérotonine que les cerveaux ne peuvent s’empêcher de créer.
Et là, je revois cet enfant de vingt-et-un ans, enfermé dans sa chambre, chez ses parents. Ce gamin qui dissimule ses peines. Et à celui-là, je lui dis : « Regarde-moi, là. Et vois que, oui, le bonheur suivra la difficulté de tes pas. »
Création originale. Tous droits réservés. ©Timothée Cueff
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