©TimothéeCueff

À toi qui lis,
Imagine un instant que tes souvenirs soient des couches de peinture.

Verte / bleue / rose / violette / rouge / noire / orange / jaune

À chaque fois que ta mémoire s’active, tu peins ton corps.
Quelle teinte prendraient tes souvenirs heureux ?
On aurait tendance à dire jaune ou orange, synonyme du soleil, de la joie, des éclats de lumière. Mais toi, sans idée reçue, sans avis extérieur, quelle couleur choisirais-tu ?

Cette nuit, mes instants de bonheur seraient bleus et ceux plus tristes, violets.
Deux couleurs suffisamment diluées de telle sorte qu’on les confondrait presque. Car en ce moment, difficile de distinguer les joies des pleurs.
Mes souvenirs les plus joyeux – ceux de fêtes, ceux remplis de rires, ceux avec toi – s’imprègnent de mélancolie, lorsque mes souvenirs malheureux – ceux de deuil, ceux des disputes, ceux des colères – se colorent de nostalgie, parce que nous étions ensemble, quelque part ailleurs qu’ici.
Ça se mélange tout ça. Puis ça se perd dans un coin de ma tête, avant d’être oublié et retrouvé lorsque, tout autour de moi, comme ce soir, le calme naît.

Rire en bleu ; pleurer en violet.

Aimer en vert ; s’énerver en jaune.

Mes souvenirs de rage irradient, comme une violente éruption solaire. Ça s’étend sur chaque neurone, chaque synapse, chaque souvenir de toi. L’envie de crier, de hurler, tout le temps, sans pouvoir m’arrêter.
Et la tendresse, à côté, se fait plus discrète. Le vert, c’est pour moi la couleur du silence. Et ces temps-ci, j’aime sans un mot, à l’écart de tout. Si loin de nous.

Je n’ai pas compté le nombre de secondes qui se sont écoulées depuis que j’ai commencé l’écriture de ce billet. Sans doute plus de soixante. Imagine, un peu : plus de soixante différentes couches de souvenirs colorés. Ça fait beaucoup pour une soirée, non ?

Mais comme chaque soir, la nuit passera et, au lendemain, j’irai me laver.
Nettoyer ma peau des centaines de teintes tatouées sur mon corps durant la journée. Restaurer une toile vierge sur laquelle la mémoire peut s’installer.
Ainsi, demain, je t’aimerais peut-être en bleu, qui sait ?

Et toi, ton corps, de quelles couleurs nos souvenirs le peindraient-ils ?

À la nuit prochaine,
Tim.


Billet n°17
Nuit du 22 au 23 novembre 2020

Derrière cet article se trouve Timothée Cueff, auteur et poète slameur aux envies d’aventures. Depuis 2023, il parcourt la France et l’Europe en quête de poésie, à bord de son van aménagé, irys.

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